tribunelibre
PAR FRÉDÉRIC TADDEÏ
L’énergie de l’espoir
On parle communément de l’“énergie du désespoir”. Pourquoi la notion d’énergie ne serait-elle associée uniquement qu’à une image négative et sans issue ? Dans cette édition, que nous avons souhaitée axée sur le thème de l’énergie, vous constaterez que, bien loin de baisser les bras, tous les acteurs du monde de la céramique, redoublent au contraire… d’énergie pour gérer au mieux les problèmes… d’énergie !


Il est vrai que pour économiser le coût en énergie que représente la cuisson d’une brique, d’une tuile, d’un lavabo, d’un carreau ou d’une assiette, le mieux serait… de ne pas les cuire ! Certains y pensent, notamment les partisans de la terre crue. Mais en attendant, fours et séchoirs ne marchent pas (encore) à l’eau de pluie et l’éolien en matière de cuisson des produits céramiques est loin d’avoir fait ses preuves ! Et je ne parle même pas de l’énergie marémotrice !

En attendant, l’optimisation des processus de cuisson et de séchage en vue, soit de réduire la consommation d’énergie, soit de produire plus, mieux et moins propre avec le même volume d’énergie, se situe au cœur de toutes les réflexions. Que ce soit du côté des fournisseurs de gaz et d’électricité ou du côté de leurs clients, l’énergie est devenue un enjeu de taille, notamment en matière de compétitivité.

En lisant les témoignages des différents industriels que nous avons questionnés, on se rend compte que la prise en compte de la problématique énergétique est devenue tout à la fois outil de gestion, action marketing, levier de croissance et surtout axe de recherche & développement. Les professionnels ne s’y trompent pas : gérer au plus fin l’énergie à tous les niveaux, de son achat jusqu’à son traitement post-industriel, est devenue une des clés essentielles de la rentabilité de leurs activités.
C’est d’ailleurs à ce niveau que se situe la terrible équation que beaucoup d’entre eux se doivent de poser avant de la résoudre : faut-il investir aussi massivement dans des équipements et processus pour réduire sa facture énergétique et demeurer vertueux à l’égard des réglementations en vigueur quand tant de concurrents étrangers bénéficient d’accès à l’énergie, au gaz notamment, dans des conditions de quasi-gratuité ?

De la facture va-t-on passer à la fracture ? Autrefois, on appliquait l’expression “fracture énergétique” au rapport nord-sud et à la difficulté pour les pays émergents du sud, d’accéder à l’énergie dont usaient et abusaient parfois les pays du nord. Cette fracture, si elle persiste hélas encore, a tendance à se réduire, remplacée par des paramètres de distorsion concurrentielle liée essentiellement au coût de la main-d’œuvre et à l’absence de respect des normes environnementales. Mais, pour une usine ouverte en Europe de l’Ouest, combien de briqueteries, tuileries, usines de carrelage ou de sanitaire sont-elles construites sur le continent africain et particulièrement au Maghreb ? Restent que les coûts du transport, qui, on le sait, vont un jour ou l’autre subir un énorme bond, risquent de temporiser cet exode nord-sud des entreprises gourmandes comme polluantes.


Pour ma part, je préférerais que ce soit l’accroissement durable et pérenne de la demande locale de ces pays émergents en matière de matériaux de construction qui diminuent leurs exportations et… et redonnent vigueur à nos entreprises à nous.

En attendant, énergie chère ou pas, le spectaculaire développement des implantations d’usines de tous les matériaux céramiques dans des pays qui sont souvent nos propres fournisseurs d’énergie (!) n’empêchent pas les entreprises françaises d’investir et de se mobiliser. Preuve qu’il reste encore de la place sous le soleil. Tient justement le soleil ! À quand la première tuilerie solaire, voire même éolienne et pourquoi pas marémotrice ? Je suis candidat pour un premier reportage…